Relazione
Relazione tedesca del prof. dr. Dieter Kugele – Potsdam – 10/10/2014
Relazione francese del dott. Pierre Vincent – Potsdam – 10/10/2014
Le rôle des juges administratifs et l’influence du politique sur leur activité, leur fonction, leur nomination et leur promotion.
Un sujet difficile, qu’il est certainement plus aisé d’évoquer hors du territoire national pour ne pas être soupçonné de complaisance envers les pratiques de son propre pays.
Nous nous félicitons de notre indépendance, parfois durement acquise, mais nous ne sommes pas dans une tour d’ivoire.
Si la justice administrative, dont toutes les décisions ne concernent pas nécessairement des instances politiques ou administratives, ne s’intéresse pas à la politique en tant qu’institution, les juges que nous sommes, s’ils doivent laisser leurs convictions politiques aux vestiaires lorsqu’ils sont dans l’exercice de leurs fonctions, n’en sont pas moins des citoyens jouissant de tous leurs droits et qui les exercent sans autre restriction de portée générale que le devoir de réserve qu’il leur appartient d’observer.
En revanche, de l’autre côté du prétoire, les politiques s’intéressent à la justice. Le juge administratif a une influence sur le politique de par les décisions qu’il rend, au premier rang desquelles l’annulation des actes administratifs individuels ou réglementaires émanant de la plus modeste autorité municipale jusqu’aux décrets délibérés en conseil des ministres, ou de par les condamnations pécuniaires ou les injonctions de faire qu’il prononce. Il est le juge naturel du pouvoir exécutif national et local. Pour ne parler que de la juridiction administrative, quel maire pourrait rester indifférent au sort de ses projets urbanistiques ou environnementaux ? Au minimum et dans le meilleur des cas, il s’assurera en amont de la régularité juridique de ses actes. Au pire, si nos contrées occidentales ne sont heureusement plus de celles où le politique exerce des pressions sur la justice pour rendre des décisions qui lui soient favorables, du moins il n’entendra pas respecter les décisions de justice ou les appliquera imparfaitement, et ce intentionnellement.
Et la France dans ce contexte ?
Je dirais qu’une apparente proximité, historique et quasi institutionnelle, de la justice administrative avec le pouvoir politique, qui frappe certains observateurs étrangers, ne fait pas obstacle à une réelle indépendance du juge par rapport au politique dans un respect réciproque des rôles de chacun.
I Une apparente proximité du pouvoir politique
Tout d’abord, une précision d’importance : En France, comme en Italie, mais plus nettement que celle-ci, et contrairement à l’Allemagne, la juridiction administrative est composée de deux organes bien distincts : Le Conseil d’Etat, auquel l’histoire et les attributions confèrent une place à part dans ses rapports avec le politique, d’une part, les cours administratives d’appel (CAA) et les tribunaux administratifs (TA), d’autre part.
Le Conseil d’Etat est d’origine beaucoup plus ancienne que les tribunaux et les cours et demeure une institution majeure dotée d’une forte identité dans le paysage institutionnel français et d’une influence considérable. Je parlerai donc plus du Conseil d’Etat que des cours et des tribunaux. Lorsque je parlerai indistinctement de juges administratifs ou de juridiction administrative, je viserai à la fois les membres des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel et les membres du Conseil d’Etat, ces derniers étant organisés en un corps distinct et doté d’un échelonnement indiciaire supérieur à celui des membres des tribunaux et des cours.
Il est significatif que les membres du Conseil d’Etat n’aient pas la qualité de magistrat, que les membres des TA et des CAA n’ont d’ailleurs acquise que récemment, par une loi du 12 mars 2012.Contrairement aux magistrats judiciaires, dont le statut est fixé par la loi depuis 1958, les juges administratifs relevaient auparavant exclusivement du statut général de la fonction publique, sous réserve de quelques règles spécifiques les concernant. Au surplus, si les membres des tribunaux et des cours se sont vu reconnaître l’inamovibilité depuis 1986, simultanément à leur rattachement au ministère de la justice et non plus au ministère de l’intérieur, les membres du Conseil d’Etat ne bénéficient pas officiellement de l’inamovibilité, qui leur est toutefois garantie par une pratique séculaire.
Cette proximité apparente avec le pouvoir politique est d’abord un legs de l’histoire
En France, la juridiction administrative ne s’est pas constituée indépendamment du pouvoir politique et pour constituer un contrepoids à celui-ci, mais en est au contraire issu.
En effet, ayant constaté combien l’action novatrice des ministres de Louis XV et Louis XVI était freinée par les Parlements régionaux, cad les cours judiciaires souveraines du royaume, qui avaient le pouvoir de refuser d’enregistrer les édits et ordonnances royales et s’opposaient souvent à la levée de l’impôt ou à la construction d’un ouvrage public à la demande de quelques mécontents soucieux de conserver leurs privilèges, l’assemblée constituante issue de la révolution de 1789 a fait en sorte d’écarter les tribunaux des litiges impliquant les activités administratives ou celles des administrateurs en tant que tels et a posé à cet effet le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires. La loi des 16-24 août 1790 sur l’organisation judiciaire, toujours en vigueur, dispose en son article 13 que « les fonctions judiciaires sont distinctes et demeureront toujours séparées des fonctions administratives .Les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler de quelque manière que ce soit les opérations des corps administratifs ni citer devant eux les administrateurs pour raison de leur fonction ».
Pour trouver un habillage conceptuel à cette volonté politique déterminante, les révolutionnaires ont fait appel à la séparation des pouvoirs, mais il est vrai à une conception bien originale de celle-ci, à savoir que si l’on permettait aux tribunaux de statuer sur les litiges dans lesquels l’administration est impliquée, on placerait le pouvoir politique sous le contrôle du pouvoir judiciaire qui s’immiscerait ainsi dans les attributions du pouvoir exécutif.
Cette déduction est discutable, à preuve que des pays qui pratiquent une véritable séparation des pouvoirs, tels que les Etats Unis, n’ont pas tiré cette conséquence, les litiges opposant le président ou les gouverneurs des Etats aux particuliers y étant jugés par les tribunaux ordinaires.
Mais cette conception originale de la séparation des pouvoirs est reconnue et assumée :
En 1987, le Conseil constitutionnel, dans une décision « Conseil de la concurrence », a fait appel à la « conception française de la séparation des pouvoirs » pour estimer qu’est au nombre des « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République » celui selon lequel « relève en dernier ressort de la compétence de la juridiction administrative l’annulation ou la réformation des décisions prises par les autorités administratives dans l’exercice de leurs prérogatives de puissance publique ».
Il ne m’appartient pas ici de retracer l’évolution qui a conduit à la situation actuelle, en passant d’une première étape de « justice retenue »par laquelle le Conseil d’Etat créé en l’an VIII(1799) avait pour mission de préparer la solution des litiges qui étaient tranchés par le pouvoir exécutif, à une seconde étape que nous qualifions « justice déléguée », instituée définitivement en 1872, le Conseil d’Etat statuant désormais au nom du peuple français.
Il convient simplement de rappeler que le juge administratif est issu du pouvoir politique et s’est constitué en opposition à la justice ordinaire (judiciaire).
Cette proximité résulte ensuite de l’exercice même de fonctions consultatives par le Conseil d’Etat, et, dans une bien moindre mesure, par les membres des TA-CAA.
Le Conseil d’Etat est consulté obligatoirement sur tous les projets de loi déposés par le gouvernement. Plus récemment, il a été prévu que le président d’une assemblée parlementaire peut soumettre pour avis au Conseil d’Etat, avant son examen en commission, une proposition de loi déposée par un parlementaire, sauf si celui-ci s’y oppose.
Le Conseil d’Etat est également obligatoirement consulté sur les projets de décrets dits « en Conseil d’Etat » (cad ceux pour lesquels la loi ou un autre décret le prévoit, auquel cas l’on emploie la formule « Le Conseil d’Etat entendu » et, facultativement, sur ceux pour lesquels le gouvernement le souhaite, auquel cas l’on emploie la formule « après avis du Conseil d’Etat ».Selon la tradition, ceci concerne notamment les décrets pris en conseil des ministres.
Tout membre du Conseil d’Etat ayant au moins trois ans d’ancienneté dans ses fonctions est simultanément membre d’une section administrative du Conseil d’Etat, lesquelles sont consultées par le gouvernement ou le parlement du point de vue de la régularité juridique des actes. Ceci crée indéniablement une grande proximité avec le gouvernement ou, pour le moins, avec les dirigeants des administrations centrales nommés par le gouvernement, lesquels sont eux-mêmes très souvent des membres du Conseil d’Etat.
Il convient également de noter que, en dehors de ces fonctions consultatives régies par la loi, de nombreux membres du Conseil d’Etat exercent, à temps partiel et temporairement, des fonctions de conseiller auprès des grands ministères, leur fonction étant de s’assurer en amont de la conformité des textes préparés par ces administrations aux dispositions de droit de rang supérieur, voire de préparer un ensemble de décrets consécutivement au vote d’une loi.
A l’inverse, les TA et CAA n’exercent pratiquement pas de fonctions consultatives auprès des autorités locales. La loi le prévoit certes, mais elles conservent un caractère quasi confidentiel. Les préfets de région peuvent ainsi soumettre une question pour avis aux CAA et les préfets de département aux TA.
Cette pratique est d’autant plus restreinte que les tribunaux et les cours refusent par principe de se prononcer lorsque les questions dont ils sont saisis donnent lieu à un contentieux et sur celles dont la réponse conditionnera l’introduction d’un contentieux. Ainsi le préfet ne pourra-t-il pas, dans l’exercice du contrôle de légalité de certains actes des collectivités territoriales qu’il lui appartient d’exercer, demander à un tribunal ou à une cour si telle délibération d’un conseil municipal ou départemental est légale ou non.
Le pouvoir politique conserve un rôle déterminant dans la nomination et la carrière des juges, à des degrés toutefois très divers
Comme tous les fonctionnaires recrutés par la voie de l’Ecole nationale d’administration (ENA), les juges administratifs sont nommés par le président de la République. Cette pratique a pour seul objet d’attester de l’importance de ces fonctions, sans que le pouvoir politique interfère en rien dans cette nomination.
En revanche, le pouvoir politique est directement impliqué dans le processus de nomination de trois catégories de membres du Conseil d’Etat :
-tout membre du Conseil d’Etat ayant l’ancienneté requise pour parvenir au grade de conseiller d’Etat (il y a trois grades : auditeur, maître des requêtes et conseiller d’Etat) est nommé à ce grade en conseil des ministres.
-il en est a fortiori de même pour l’accès aux plus hautes fonctions au sein du Conseil d’Etat : vice-président et présidents de section.
– nominations au « tour extérieur » : Un poste vacant de conseiller d’Etat sur trois et un poste vacant de maître des requêtes sur quatre est pourvu par le gouvernement. Les maîtres des requêtes ainsi nommés sont nécessairement des fonctionnaires ayant au moins 10 ans d’activité en cette qualité. En revanche, peut être nommé conseiller d’Etat au tour extérieur toute personne sans autre condition que d’âge (au moins 45 ans).
L’exercice éventuel d’un mandat politique par les membres du Conseil d’Etat ou des cours et tribunaux est enfin facilité par certaines dispositions statutaires
Tout d’abord, contrairement à certains pays européens et non des moindres, les juges administratifs jouissent de l’intégralité de leurs droits civils et politiques. Ils se voient reconnaître la liberté d’opinion, comme tous les fonctionnaires, et peuvent notamment adhérer sans restriction à un parti politique, à un syndicat ou à une association. Sous réserve de rares inéligibilités et incompatibilités, un juge administratif peut notamment être candidat à tout mandat électif.
Les magistrats administratifs ne s’en privent pas et leur statut ne prévoit que très peu de cas d’inéligibilité ou d’incompatibilité de leurs fonctions avec l’exercice simultané d’un mandat politique :
Les magistrats du corps des TA-CAA ne peuvent ainsi être élus dans le ressort de la juridiction où ils exercent ou ont exercé depuis moins de six mois. Cette règle de bon sens préserve en revanche la possibilité d’une élection en dehors du ressort du tribunal, qui peut être très restreint, notamment en région parisienne. A l’inverse, ne peuvent être nommés dans le ressort correspondant d’un tribunal ou d’une cour les magistrats qui ont exercé depuis moins de trois ans dans ce ressort des fonctions publiques électives ou de hautes responsabilités administratives telles que préfet.
Ne sont par ailleurs incompatibles avec l’exercice des fonctions de membre du corps des TA-CAA que les fonctions de président d’un conseil régional ou d’un conseil départemental, fonctions dont l’importance nécessiterait de toute façon que leurs titulaires soient déchargés de toute obligation professionnelle. Comme pour toute fonction publique non élective, sont également incompatibles avec l’exercice des fonctions de membre de la juridiction administrative le mandat de député, de sénateur ou de représentant au parlement européen, dont l’importance exclurait de toute façon tout exercice simultané des fonctions de magistrat .Ceci n’empêche pas que des magistrats puissent accéder à ces fonctions, mais ils y seront alors détachés pour les exercer à temps complet.
Surtout, ce que remarquent à juste titre nombre d’observateurs étrangers, des dispositions statutaires, certes applicables à l’ensemble des fonctionnaires et non aux seuls juges administratifs, mais dont ceux-ci bénéficient au premier chef eu égard à l’aptitude particulière à l’exercice d’un mandat politique que leur confèrent leur travail quotidien de juge, leur permettent de concilier très aisément leur qualité de juge et l’exercice d’un mandat politique ,et ce grâce à deux mécanismes :Le détachement et la disponibilité :
Le détachement est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son corps d’origine, continue à y bénéficier de ses droits à l’avancement et à la retraite : utilisé par les juges administratifs pour être affectés dans d’autres corps également recrutés par la voie de l’ENA ou de niveau équivalent (magistrats judiciaires, sous-préfets, administrateurs civils, diplomates.(NB : Le corps des TA-CAA accueille réciproquement de nombreux fonctionnaires détachés de leur administration d’origine tels qu’administrateurs civils, magistrats judiciaires, professeurs et maîtres de conférence des Universités, directeurs d’hôpitaux ou directeurs de grandes collectivités territoriales), le détachement est expressément prévu pour exercer les fonctions de membre du gouvernement ou toute fonction publique élective, et ce sans limitation de durée. Il est en effet prévu pour une durée de 5 ans mais peut être renouvelé indéfiniment. Toutefois, par dérogation à la règle générale rappelée ci-dessus, le détachement en vue de l’exercice d’une fonction élective ou de membre du gouvernement ne donne pas droit à avancement dans le corps d’origine.
Nombre de membres du Conseil d’Etat ont accédé aux plus hautes fonctions, et ce particulièrement sous l’actuelle 5ème République : un président de la République, G.Pompidou, et plusieurs Premiers ministres : M.Debré, le même G.Pompidou, L.Fabius et E.Balladur. Ils sont par ailleurs très présents dans les postes de haute responsabilité de conseillers politiques du Président de la République et du Premier ministre, tels que secrétaire général de l’Elysée ou directeur de cabinet du Premier ministre.
Les membres des TA-CAA ne sont pas en reste : L’actuel gouvernement comporte deux ministres issus de ses rangs, détachés de ce corps depuis plusieurs dizaines d’années et n’y ayant pratiquement jamais exercé leurs fonctions, et un jeune secrétaire d’Etat, qui vient d’être nommé à ces fonctions et était auparavant député.
La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son corps d’origine, cesse de bénéficier de ses droits à l’avancement et à la retraite.
Elle est notamment de droit lorsqu’un fonctionnaire cesse temporairement l’exercice de ses fonctions pendant le temps d’une campagne électorale.
II Une réelle indépendance du juge par rapport au politique
Une prise en compte très limitée de considérations politiques dans le processus de nomination et de promotion des juges
Les nominations et promotions sont effectuées par décret du Président de la République, tant pour les membres du corps des TA-CAA que pour le Conseil d’Etat, mais selon des procédures très différentes.
Pour les TA et CAA, le processus intervient en deux temps :
Un décret du Président de la République arrête tout d’abord le tableau d’avancement aux grade de premier conseiller (essentiellement sur la base de l’ancienneté d’exercice des fonctions) et au grade de président (selon des critères prenant en compte simultanément l’ancienneté et le mérite) et, au sein du grade de président, la liste d’aptitude aux fonctions de président de tribunal et de président de chambre en cour ,et plus récemment de premier vice-président de cour et de certains grands tribunaux(avec un rôle prépondérant accordé au mérite).
Dans un second temps, intervient un nouveau décret du Président de la République, pris sur rapport du Premier ministre et du garde des sceaux, ministre de la justice, qui nomme aux emplois que briguaient les magistrats figurant sur ces tableaux d’avancement et listes d’aptitude.
Le point commun de ce processus en deux temps est l’intervention du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel(CSTA).
Le premier décret est pris « sur proposition du CSTA » et le second « après avis du CSTA ».Il n’est pas d’exemple que les propositions du CSTA et l’avis de ce dernier n’aient pas été suivis.
Le pouvoir politique ne pourrait donc exercer une éventuelle influence sur les promotions des juges que s’il était en mesure de peser sur les avis du conseil supérieur, ce qui est tout à fait impossible, compte tenu de sa composition (cinq membres représentant l’administration, dont trois issus du Conseil d’Etat, cinq représentants élus par les magistrats, et trois personnalités extérieures). Ces trois personnalités sont certes nommées respectivement par le président de la République et les présidents de chacune des deux assemblées parlementaires, comme pour le Conseil constitutionnel, mais elles ne doivent pas exercer de mandat politique. Jamais ces représentants ne proposent tel ou tel magistrat pour un avancement, et leur présence constitue uniquement un gage de transparence du Conseil supérieur par rapport à l’opinion publique.
Les tableaux d’avancement et listes d’aptitude sont préparés par le secrétaire général du Conseil d’Etat sur la base des propositions des chefs de juridiction, et, pour les postes de chef de juridiction, par la mission d’inspection des TA-CAA, sans aucune influence du pouvoir politique.
Dans une moindre mesure que les concours de recrutement (Ecole nationale d’administration et recrutement direct), des agents publics peuvent accéder au corps des TA-CAA par voie de détachement et par le biais du « tour extérieur ». Le pouvoir politique ne peut en rien influer sur ces nominations, qui interviennent également après avis du CSTA,
Pour le Conseil d’Etat, il faut distinguer entre les promotions internes et le tour extérieur :
Les promotions internes aux grades de maître des requêtes et de conseiller d’Etat sont régies exclusivement à l’ancienneté, et ce alors même que la nomination des conseillers d’Etat est prise par décret en conseil des ministres.
Les promotions aux fonctions les plus élevées réservées aux conseillers d’Etat (présidents de section et vice-présidents de la section du contentieux) interviennent en fait selon un processus purement interne, que le décret du président de la République ne fait qu’avaliser : le vice-président du Conseil d’Etat propose trois noms pour chaque poste, mais la tradition veut que le président de la République choisisse toujours celui figurant en premier sur la liste.
Quant au vice-président du Conseil d’Etat, qui en assure la présidence, ce poste est occupé par une personnalité de très haut niveau, toujours connue des cercles gouvernementaux de par les fonctions qu’elle a exercées antérieurement. Le poids du politique est ici, bien sûr, prépondérant, mais le choix se porte toujours sur une personnalité reconnue dépasser les clivages politiques. Il est significatif à cet égard de noter que l’actuel vice-président du Conseil d’Etat ainsi que ses deux prédécesseurs exerçaient, juste avant leur nomination, les fonctions de secrétaire général du gouvernement, cad de chef des services du Premier ministre, qui a en charge de préparer les projets de loi et de décret et siège en cette qualité au conseil des ministres.
Le tour extérieur aux grades de maître des requêtes et de conseiller d’Etat est (hormis le tour extérieur réservé aux membres du corps des TA-CAA, qui suit un processus identique à celui des promotions au sein de ce corps) le seul pour lequel les propositions appartiennent au pouvoir politique. Et, de fait, il est tentant pour le gouvernement de proposer à ces nominations, non seulement des hauts fonctionnaires (directeurs d’administration centrale, préfets, ambassadeurs…) qui ont fait preuve de leurs capacités et pour lesquels l’accès au Conseil d’Etat est une consécration naturelle de leur talent, mais également des collaborateurs issus de leur cabinet, à profil plus politique et n’ayant donc pas toujours les compétences requises. Il existe toutefois un contrepoids très important à ce pouvoir : L’avis obligatoire du vice-président du Conseil d’Etat, institué depuis 1994, avis dont le sens est publié au Journal officiel.
Bien entendu, les ministres s’assurent auparavant que leur candidat recevra un accueil favorable de la part du Conseil d’Etat, car aucun d’entre eux ne courrait le risque d’un avis négatif, qui entacherait à jamais la réputation de la personne en cause. Et si jamais-ce qui est théoriquement possible-la nomination était prononcée nonobstant un avis défavorable, le fait que cet avis soit public rendrait en pratique très difficile la situation de la personne qui serait ainsi nommée.
Il arrive également que des personnalités connues- souvent d’anciens ministres-soient nommées membres du Conseil d’Etat.
Certaines d’entre elles, dûment informées qu’elles ne pourront en aucun cas jouir d’un quelconque privilège ou avantage lié à leurs fonctions antérieures, seront très vite acceptées par la « maison ».D’autres, en revanche, qui conçoivent leur nomination comme une parenthèse en l’attente d’un accès à d’autres responsabilités politiques, la quitteront dès que l’opportunité se présentera.
Un apolitisme réel au quotidien :
Une influence nulle du politique sur le processus de décision.
Le Conseil constitutionnel a affirmé en 1980, soit à une époque où les tribunaux administratifs étaient encore gérés par le ministère de l’intérieur, au titre des « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République » le principe, de valeur constitutionnelle, de l’indépendance des juridictions administratives « ainsi que le caractère spécifique de leurs fonctions, sur lesquelles ne peuvent empiéter ni le législateur, ni le gouvernement ».
C’est ce même principe d’indépendance de la juridiction administrative que le Conseil d’Etat considère (décision M.H..5 octobre 2005, n°281041) comme fondement des règles d’avancement des membres du Conseil d’Etat, lesquelles « excluent que la nomination d’un membre exerçant les fonctions de rapporteur au grade supérieur puisse prendre en compte les positions prises par celui-ci(au demeurant inconnues du public et des requérants)dans l’exercice de ses fonctions ».
Il existe par ailleurs et surtout une tradition réciproque bien ancrée de respect réciproque de la justice administrative et du pouvoir politique au plus haut niveau. Il faut remonter à 1983 pour voir mettre en cause publiquement l’objectivité du Conseil d’Etat par un parti politique associé au pouvoir, pour avoir annulé pour irrégularités l’élection de certains conseils municipaux après les élections municipales de 1983.Il est vrai que, tout au moins au niveau des apparences, cette critique n’était pas dépourvue de tout fondement, dès lors que l’un des arguments mis en avant était l’appartenance de deux commissaires du gouvernement(aujourd’hui appelés « rapporteurs publics ») aux organes dirigeants d’un parti de l’opposition, situation qui ne se rencontrerait plus aujourd’hui .
Si les juges administratifs de base sont parfois vilipendés par les élus locaux pour des jugements qui leur déplaisent, il est rare qu’on leur reproche leur politisation. Et toute tentative de leur part d’influer sur le sens des décisions-notamment par appel téléphonique auprès du président ou contact informel avec un juge qu’ils connaissent-se retournerait vite contre son auteur.
Il y a eu parfois des tentatives plus sournoises d’influer sur le sens des décisions : Il y a une quinzaine d’années, un service préfectoral avait tenté-semble-t-il sans que le préfet lui-même en soit prévenu-de se procurer le tour de permanence des juges pour traiter en urgence les recours contre les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, après avoir remarqué que certains juges étaient plus sensibles que d’autres aux arguments des requérants, ceci afin d’édicter leurs arrêtés à une date telle qu’un recours serait traité par un juge présumé être moins favorable à ces arguments. Une telle tentative a vite fait long feu et de telles pratiques, qui font sourire, relèvent plus de l’anecdote que de la réalité.
Afin de ne pas encourir le reproche récurrent de trop grande proximité du pouvoir politique que pourrait susciter la pratique de fonctions consultatives par le Conseil d’Etat et la double appartenance de la majorité des membres du Conseil d’Etat à une section administrative et à la section du contentieux, le Conseil d’Etat s’est par ailleurs attaché à définir de très strictes règles en interne :
C’est ainsi que, même si ce secret est par nature partagé avec le gouvernement ou les hauts fonctionnaires qui le représentent, le délibéré des sections administratives est secret, comme celui des formations contentieuses. Il recouvre le secret de leur ordre du jour, le secret du contenu des avis, tant que le gouvernement n’en a pas autorisé la divulgation, et le secret des opinions émises par chacun au cours des débats.
Lorsqu’un texte passé devant une section administrative voit sa légalité discutée au contentieux, les membres de la section du contentieux appelés à en connaître (qui ne peuvent en aucun cas avoir participé au délibéré de la section administrative le concernant) ne pourront pas prendre connaissance des avis de la section administrative s’ils n’ont pas été publiés, ni même accéder aux dossiers des sections administratives se rapportant à ces avis.
Une attitude quotidienne des juges éloignée des préoccupations politiques :
L’appartenance d’un juge à un parti politique, comme tout autre élément relatif à la vie privée de l’intéressé (appartenance à tel syndicat ou association..) ne figure pas dans leur dossier : demeurant inconnue de l’autorité hiérarchique, elle l’est a fortiori vis-à-vis de l’extérieur.
Il est en pratique mal vu pour un magistrat d’afficher ses opinions politiques devant ses collègues, ce qui contrevient à notre charte de déontologie.
La loi prévoit que tout membre du Conseil d’Etat doit s’abstenir de toute manifestation de nature politique incompatible avec la réserve que lui imposent ses fonctions.
De même, il est un principe fondamental, réaffirmé par la charte de déontologie de la juridiction administrative, que nul ne peut se prévaloir de sa qualité professionnelle à l’appui de sa candidature à un mandat électif et, plus généralement, pour toute expression publique d’opinions à caractère politique.
La « charte de déontologie des membres de la juridiction administrative :principes et bonnes pratiques » ,document commun aux membres du Conseil d’Etat et des TA-CAA, élaborée en 2011, dispose en effet que « Les membres de la juridiction administrative exercent leurs fonctions avec impartialité et en toute indépendance .Ces principes fondamentaux exigent que chacun ,en toute occasion, se détermine librement, sans parti pris d’aucun sorte, ni volonté de favoriser telle partie ou tel intérêt particulier et sans céder à aucune pression ».
Plus précisément, elle dispose que les membres de la juridiction administrative « se conduisent de manière à préserver et à renforcer la confiance des administrés et des justiciables dans l’intégrité, l’impartialité et l’efficacité de la juridiction administrative ».
Elle a de même édicté cette recommandation, à l’endroit de ceux qui seraient au contraire trop timorés : « Ils font abstraction, dans l’exercice de leur mission, de tout préjugé, quelle qu’en soit la nature, et ne sont mus, dans leurs décisions, ni par la crainte, ni par l’espoir d’une conséquence sur leur carrière.. ».
Chacun est invité, pour prévenir les conflits d’intérêt, à avoir un entretien déontologique avec son supérieur lorsque, par leur nature ou leur intensité, les intérêts ou activités extérieurs du magistrat imposent(au-delà de la pratique du « déport » dans une affaire particulière) d’éviter que certains dossiers ne soient traités par ce magistrat afin que ne naisse aucun doute légitime, même du seul point de vue des apparences, sur son indépendance et son impartialité.
Un collège de déontologie, constitué de trois magistrats jouissant d’une considération unanime, dont un extérieur à la justice administrative, a été constitué pour éclairer, à leur demande, les membres de la juridiction administrative sur l’application de la charte dans un cas particulier. Outre les réponses ponctuelles sur les cas dont il est saisi, il a notamment élaboré une recommandation générale (n°1-2013) concernant les candidatures des juges administratifs aux élections municipales, les précautions à prendre en période préélectorale et le traitement du contentieux électoral après les élections.
Une pratique d’activités politiques par les magistrats bien plus modérée que les textes ne le permettent :
Statistiquement, le nombre de magistrats titulaires d’un mandat politique, déjà très faible, tend à décroître. Sur plus de 1200 membres du corps des TA-CAA, seuls quatre sont détachés en vue de l’exercice de responsabilités politiques à temps plein : deux ministres, un secrétaire d’Etat et un maire d’une commune importante.
Ce mouvement touche non seulement les fonctions publiques d’importance, qui nécessitent le détachement ou la mise en disponibilité du magistrat, mais surtout les fonctions moins importantes de maire d’une petite commune ou de conseiller municipal, qui demeurent théoriquement compatibles avec l’exercice de leurs fonctions. Au-delà de la modification du profil moyen des juges administratifs, dont la plupart n’ont maintenant aucune expérience administrative antérieure avant leur réussite aux concours d’entrée, l’élément fondamental qui explique cette évolution est l’accroissement continu de la charge de travail des magistrats, qui ne leur permet plus guère de s’investir dans d’autres responsabilités.
Aucun bénéfice ne peut par ailleurs être tiré pour la carrière de l’exercice d’un mandat politique et réciproquement de l’appartenance à la magistrature administrative pour l’exercice d’un mandat politique. L’exercice d’un mandat politique ne peut donc influer positivement sur le déroulement de la carrière. C’est même en pratique toujours le contraire.
Relazione italiana del pres. Francesco Mariuzzo – Potsdam – 10/10/2014
Il ruolo del giudice amministrativo e il suo rapporto con la grande politica
1 – Il tema del nostro convegno esige un breve riferimento all’origine storica della giustizia amministrativa italiana, che trova la sua premessa dapprima nella L. 20.3.1865, n. 2248, che ha affidato, da una parte, le controversie aventi a oggetto i diritti soggettivi alla giurisdizione del giudice ordinario e, dall’altra, ogni altra lite con la pubblica amministrazione a commissioni costituite al suo interno. Soltanto nel 1889 fu aggregata al Consiglio di Stato, organo di consulenza del Re, una IV Sezione, avente natura egualmente amministrativa, ma destinata a operare in una posizione di sostanziale autonomia e indipendenza. Nel 1907 il legislatore attribuì, poi, la natura giurisdizionale alla IV e alla neo costituita V Sezione; la creazione delle due Sezioni offriva ai ricorrenti la possibilità di ottenere una pronuncia di annullamento dei provvedimenti amministrativi impugnati, il che concretava peraltro un controllo di mera legittimità, ben lontano dall’accertamento della fondatezza o meno delle pretese avanzate nei processi contro la pubblica Amministrazione.
Nel 1948 il sistema ha trovato conferma negli artt. 100, 103 e 125 della Costituzione: con la prima norma il Consiglio di Stato è stato riconosciuto come organo di consulenza giuridica e amministrativa del Governo e di giustizia all’interno dell’Amministrazione; con la seconda norma, che figura nel titolo V che riguarda la magistratura ordinaria, è stata attribuita al Consiglio di Stato la tutela giurisdizionale degli interessi legittimi e, in particolari materie, anche dei diritti soggettivi; con la terza norma è stata prevista l’istituzione di organi di giustizia di primo grado in ciascuna regione della Repubblica.
Nel nuovo quadro costituzionale introdotto dopo la caduta del fascismo il Consiglio di Stato ha dunque mantenuto la sua precedente posizione bifronte di consulente del Governo e di organo deputato all’esercizio della giurisdizione. L’esistenza di tali duplici funzioni ha dunque precluso la sua separazione dall’Amministrazione, il che suscita in dottrina ricorrenti dubbi sulla sua imparzialità, terzietà e autonomia nella gestione della giustizia.
Avendo il piacere di essere qui a Potsdam ricordo che, sin dalla seconda metà del 1800, la Prussia aveva costituito una Corte avente struttura e funzioni esclusivamente giurisdizionali del tutto analogamente a quanto era avvenuto nel Granducato del Baden e che, inoltre, la Costituzione adottata dopo la seconda guerra mondiale dalla Repubblica federale ha sottratto la magistratura amministrativa da ogni contatto con l’Amministrazione, proclamandone così la separazione da quest’ultima e dunque la sua indipendenza.
Con grande ritardo, che taluni riferiscono all’ostilità del Consiglio di Stato, il sistema è stato integrato nel 1974 in applicazione dell’art. 125 della Costituzione italiana con la creazione dei Tribunali amministrativi regionali, quali organi di primo grado; essi si differenziano dal Consiglio di Stato, essendo privi di funzioni consultive a favore delle Amministrazioni locali e operando conseguentemente in una posizione d’indipendenza e di terzietà.
2 – A questa breve premessa segue ora qualche cenno sulla posizione dei consiglieri di Stato e dei giudici dei tribunali amministrativi regionali.
Con il testo unico del 26.6.1924, n. 1054 i consiglieri di Stato, ivi compresi il Presidente del Consiglio e i Presidenti di sezione, erano nominati con decreto reale su proposta del Ministro dell’Interno dopo deliberazione del Consiglio dei Ministri; i posti per l’ingresso nella carriera erano conferiti ai vincitori di un concorso per titoli e per esami al quale potevano partecipare i pubblici funzionari che avessero la laurea in giurisprudenza. La promozione al grado immediatamente superiore avveniva con una valutazione della professionalità dei singoli giudici dopo due anni di servizio, previa proposta da parte del Consiglio di Presidenza composto dal presidente del Consiglio di Stato e dai presidenti di sezione.
La promozione a consigliere, a Presidente di sezione e a Presidente del Consiglio di Stato avveniva con applicazione della regola dell’anzianità di servizio. Tale sistema era giustificato dalla necessità di evitare ogni intervento da parte della politica in materia di promozioni: il che avviene tutt’oggi nonostante competa al Governo la formale competenza a sottoscrivere le proposte di promozione avanzate da parte del Consiglio di Presidenza.
Con la L. 6.12.1971, n. 1034 è stato previsto che i magistrati dei Tribunali amministrativi regionali fossero assunti tramite un concorso per titoli ed esami. La loro nomina al grado superiore avveniva dopo sei anni di servizio con una valutazione della professionalità dei singoli giudici per i 2/3 dei posti disponibili; per il residuo 1/3 la promozione avveniva per anzianità, previo giudizio d’idoneità, il che in tal caso significava che la carriera scorreva più lentamente. La successiva promozione a consiglieri di Tribunale amministrativo avveniva dopo ulteriori sei anni senza alcun giudizio sulla professionalità e secondo la regola dell’anzianità. In tale secondo passaggio scompare dunque ogni valutazione del merito dei singoli magistrati.
La prosecuzione della carriera per i consiglieri dei Tribunali poteva sin da allora proseguire in primo grado fino alla nomina a Presidente di Tribunale; in alternativa poteva essere richiesto il trasferimento al Consiglio di Stato nel limite di ¼ dei posti disponibili per i consiglieri dei Tribunali amministrativi con almeno quattro anni di servizio in tale qualifica; per questo trasferimento, al quale conseguiva l’assegnazione della qualifica di consigliere di Stato, era richiesto il parere positivo del Consiglio di presidenza dei tribunali amministrativi regionali, che ha costantemente applicato la regola dell’anzianità di servizio, egualmente con esclusione di ogni riscontro del merito.
In questo quadro è singolare notare che la legge del 1971 prevedeva un Consiglio di presidenza dei Tribunali amministrativi regionali distinto da quello già esistente e operativo per il Consiglio di Stato. Detto nuovo Consiglio istituito per i Tribunali amministrativi regionali si costituiva su base non elettiva e non era composto esclusivamente dai giudici di primo grado, ma dal presidente del Consiglio di Stato, dai due Presidenti di sezione del Consiglio di Stato più anziani, da due Presidenti di Tribunale amministrativo regionale e da quattro giudici amministrativi regionali estratti a sorte ogni due anni.
E’ da segnalare che per molti anni i presidenti dei tribunali amministrativi regionali erano esclusivamente consiglieri di Stato, il che significava che nel detto Consiglio la maggioranza era costantemente rappresentata dai rappresentanti del Consiglio di Stato.
La vista disciplina è mutata con l’entrata in vigore della L. 27.4.1982, n. 186, che ha abrogato il Consiglio di presidenza dei Tribunali amministrativi regionali e istituito un unico Consiglio composto, oltre che dal Presidente del Consiglio di Stato e dai due Presidenti di sezione più anziani, da quattro magistrati in servizio presso il Consiglio di Stato e da sei magistrati in servizio presso i tribunali amministrativi regionali: i primi erano eletti dai componenti del Consiglio di Stato e i secondi dai giudici dei Tribunali amministrativi regionali. Anche nel nuovo Consiglio persisteva comunque la maggioranza dei consiglieri di Stato.
Con la successiva L. 21.7.2000, n. 205 la composizione del Consiglio di presidenza è stata ulteriormente modificata: non sono stati più previsti i due Presidenti di sezione più anziani del Consiglio di Stato e sono stati introdotti nella precedente composizione quattro componenti eletti, due dalla Camera dei deputati e due dal Senato della Repubblica; essi sono scelti tra i docenti universitari in materie giuridiche o fra gli avvocati con venti anni di esercizio dell’attività professionale. Con tale nuova composizione è venuta meno nel Consiglio di Presidenza l’esistenza di una precostituita maggioranza del consiglieri di Stato, essendo rimasto immutato il numero dei magistrati eletti in rappresentanza del Consiglio di Stato e dei Tribunali amministrativi regionali.
Tra le funzioni del nuovo Consiglio figurano: 1) le assunzioni, l’assegnazione di sedi e di funzioni, i trasferimenti, le promozioni, il conferimento di funzioni direttive; 2) l’adozione di provvedimenti disciplinari riguardanti i magistrati; 3) il conferimento ai magistrati di incarichi estranei alle loro funzioni; 4) la dispensa per casi eccezionali e per motivate ragioni dall’obbligo di residenza stabile in un comune della regione, ove ha sede il tribunale dove è prestato il servizio.
Nell’esercizio di queste funzioni il Consiglio di presidenza ha assunto il ruolo di organo di autogoverno della magistratura amministrativa.
- a) Per quanto attiene alle promozioni nei Tribunali amministrativi la disciplina introdotta dalla richiamata legge del 1982 è assai più benevola rispetto a quella precedente, poiché il passaggio alle due qualifiche superiori in precedenza previste avviene ora dopo soli quattro anni di servizio per l’una e per l’altra. La promozione è accordata seguendo il ruolo di anzianità, restandone escluso soltanto quel magistrato per il quale sia stato accertato il demerito.
Può rilevarsi in proposito che, per l’adozione delle viste promozioni, è formalmente scomparsa nel quadro legislativo ogni valutazione del maggiore o minore merito dei singoli magistrati con un conseguente regresso rispetto a quanto stabilito dalla legge del 1971, che pur parzialmente la prevedeva; che, inoltre, nella prassi consolidatasi dal 1982 è scomparsa anche ogni ricerca dell’eventuale demerito, per cui le promozioni sono accordate seguendo semplicemente il ruolo di anzianità.
- b) Quanto alla composizione del Consiglio di Stato la riforma del 1982 ha duplicato i posti riservati ai consiglieri dei Tribunali amministrativi regionali, pari ora al 50% di quelli vacanti; detto passaggio è subordinato a un giudizio favorevole espresso dal Consiglio di presidenza in base alla valutazione dell’attività giurisdizionale svolta e dei titoli anche di carattere scientifico in possesso degli aspiranti al trasferimento, nonché dell’anzianità di servizio. Nella prassi, peraltro, anche l’acquisto della qualifica di consigliere di Stato avviene dal 1982 sulla base dell’anzianità di servizio, assente restando la valutazione prescritta dalla legge.
Il 25% dei posti disponibili è, poi, riservato alla nomina da parte del Presidente della Repubblica, che individua i nuovi consiglieri di Stato pressoché esclusivamente fra alti funzionari della pubblica Amministrazione; per tale designazione è previsto un parere da parte del Consiglio di presidenza sulla base dell’attività svolta e degli studi compiuti dai candidati.
Infine, il 25% dei posti disponibili è assegnato ai vincitori di un concorso pubblico per titoli ed esami, cui possono partecipare i magistrati amministrativi con almeno un anno di anzianità, i magistrati ordinari e contabili con almeno quattro anni di anzianità, nonché i funzionari della Camera dei deputati e del Senato della Repubblica e i dirigenti della pubblica Amministrazione in possesso della laurea di giurisprudenza. Al superamento del concorso i vincitori sono nominati direttamente consiglieri di Stato, essendo state soppresse le precedenti due qualifiche.
La possibilità di un ingresso diretto in Consiglio di Stato rende dunque manifesto che lo stesso mantiene un suo autonomo reclutamento; che le due magistrature del Consiglio di Stato e dei Tribunali amministrativi regionali restano separate; che non è stato soddisfatto l’auspicio manifestato dal Legislatore nel 1982 di un generale riordino dell’ordinamento della giustizia amministrativa sulla base dell’unicità di accesso e di carriera.
3 – All’illustrazione dello stato giuridico dei magistrati amministrativi italiani non può che far seguito il quadro del trattamento economico, quale si è sviluppato con le L. 25.7.1966, n. 570 e 20.12.1973, n. 831, aventi a oggetto per la magistratura ordinaria la nomina a magistrato di Corte d’appello e a magistrato di Cassazione, che sono qualifiche alle quali sono equiparate quelle della magistratura amministrativa.
Con le viste leggi è stato previsto che gli aumenti della retribuzione fossero assegnati secondo la regola dell’anzianità di servizio e indipendentemente dal conferimento delle funzioni superiori. Tali leggi sono state adottate con una assai generosa lettura da parte del Legislatore dell’art. 107, 3° comma della Costituzione, che stabilisce che i magistrati si distinguono fra loro soltanto per diversità delle funzioni.
L’applicazione di queste leggi negli anni ha, tuttavia, prodotto una grave diseguaglianza nella magistratura, poiché la maggiore responsabilità dei giudici con funzioni superiori non ha trovato alcun riconoscimento sul piano economico.
Con successiva L. 6.8.1984, n. 425 la progressione economica della retribuzione è stata prevista in otto classi biennali del 6% da calcolare sulla retribuzione di ciascuna qualifica; dopo la maturazione delle dette classi gli aumenti sono previsti nella misura del 2,5°%; l’importo maturato nel tempo per le classi e per gli aumenti biennali della precedente qualifica si sommano, poi, alla retribuzione base di quella superiore.
Al fine di garantire l’autonomia della magistratura e sottrarre le associazioni delle magistrature ordinaria, amministrativa e contabile dall’onere di contrattare periodicamente con il Governo il nuovo trattamento economico la L. 19.2.1981, n. 27 ha previsto che le retribuzioni delle magistrature siano adeguate automaticamente ogni tre anni nella misura percentuale pari alla media degli incrementi realizzati nel triennio precedente dalle altre categorie dei pubblici dipendenti.
Tale previsione ha consentito un progressivo aumento delle retribuzioni dei magistrati in misura superiore a quelle dei pubblici dipendenti, poiché le dette percentuali sono state applicate su stipendi notevolmente maggiori.
A tale status retributivo si è costantemente correlata la possibilità di conseguire dal Governo incarichi retribuiti per l’assunzione di responsabilità nei gabinetti dei Ministri e negli Uffici legislativi, oltre a incarichi di natura diversa da parte di Enti pubblici. In tal caso il consigliere di Stato o di Tribunale amministrativo regionale poteva (e può tutt’oggi) essere esonerato dall’assolvere le funzioni di magistrato, conservando la propria retribuzione e sommando a questa il compenso corrisposto per lo svolgimento degli incarichi esterni.
Anche sotto questo profilo si tratta di vicende che mettono a stretto contatto i magistrati amministrativi con la grande politica, attivando, tuttavia, dubbi sull’esistenza di un’effettiva autonomia e indipendenza dei singoli giudici dopo il rientro nel Consiglio di Stato o nei Tribunali amministrativi regionali.
4 – Resta ora da svolgere qualche considerazione quanto al quadro nel quale opera la magistratura amministrativa di primo e di secondo grado.
Il sistema di autogoverno previsto nella Costituzione repubblicana esalta le garanzie d’indipendenza della magistratura ordinaria; tale disciplina ha indotto successivamente il Parlamento a riconoscere la stessa autonomia con due leggi successive sia alla magistratura amministrativa sia a quella contabile.
La scelta dell’autogoverno fondata sui valori della Costituzione ha totalmente separato le magistrature dal potere politico con riguardo alla loro gestione e a un sistema di controlli esterni, il che ha assunto il significato della rinuncia della politica all’esercizio della sua autonoma responsabilità, comportamento quest’ultimo che si è manifestato costantemente nel corso degli anni in occasioni nelle quali sono state omesse iniziative che sarebbero state al contrario doverose.
Di fronte a una separazione che si estende anche al trattamento retributivo c’è da chiedersi se siano state efficacemente difese l’autonomia e l’indipendenza delle magistrature, evitando contestualmente che la loro gestione si trasformasse in corporativismo.
Il sistema adottato nella Costituzione esprime il ripudio da parte dell’assemblea costituente della disciplina esistente nel periodo della dittatura fascista e la necessità di garantire dunque l’indipendenza della magistratura nei confronti del potere esecutivo; questo sistema è stato considerato un modello di qualità dal Comitato consultivo dei giudici europei del Consiglio d’Europa, ma ha fatto registrare nel tempo livelli di efficienza non in linea con gli standard internazionali di applicazione della legge e con il tasso di fiducia da parte dei cittadini e delle imprese nazionali ed estere che intendano effettuare degli investimenti in Italia; questo tasso è, infatti, inaspettatamente più basso rispetto a quello degli altri Paesi OCSE, essendo la durata media dei processi nettamente al di sopra della media europea.
E’ stato, al riguardo, osservato dalla dottrina che l’Italia appartiene alla classe di quei Paesi che hanno adottato un assetto istituzionale di autogoverno con l’obiettivo di massimizzare le garanzie d’indipendenza della magistratura, ma che nel contempo si situa fra i Paesi europei con il più basso indice di rule of law; il che non può essere certo imputato alle risorse destinate al settore della giustizia nel bilancio dello Stato, che sono comparabili con quelle degli altri Paesi europei.
La causa di questi risultati, che accomunano la giustizia civile, penale e amministrativa, è stata da tempo individuata dagli studiosi delle scienze politiche nella gestione prettamente corporativa dei magistrati da parte degli organi di autogoverno, che non esercitano con equilibrio ed efficienza le funzioni per le quali detti organi sono stati costituiti; essi omettono, infatti, di attribuire incentivi e di comminare sanzioni, di porre vincoli e prospettare opportunità con conseguente smarrimento della ricerca della professionalità dei singoli e con una progressiva perdita della qualità dell’attività giudiziaria e dell’efficienza sul piano organizzativo.
Il sistema delineato dalla Costituzione induce dunque malinconicamente a riconoscere che il modello astratto di autogoverno delle magistrature nel quale si sono riposte tante positive aspettative non ha raggiunto i potenziali obiettivi da perseguire, fruendo della piena autonomia dal potere politico; al contrario si è manifestato, come è stato ricordato dagli studiosi, uno sbilanciamento eccessivo in favore dell’indipendenza senza che ad essa abbiano corrisposto efficaci meccanismi di controllo organizzativo sulle strutture giudiziarie.
Per quanto riguarda il Consiglio superiore della magistratura, che è l’organo di governo della magistratura ordinaria, desta sorpresa che la politica che è stata cacciata dalla porta sia poi rientrata dalla finestra; i componenti eletti da parte dei magistrati sono, infatti, ormai da anni espressione di correnti manifestamente politiche che si sono formate nella magistratura e che spaziano dalla sinistra, al centro e alla destra; gli accordi fra le correnti sono determinanti per l’adozione delle più rilevanti delibere e, in particolare, per le promozioni alle funzioni superiori, che sono di frequente il risultato di una faticosa spartizione dei posti più importanti, essendo caduto il potere di veto da parte del Governo a seguito della sentenza 27.7.1992, n. 379 della Corte costituzionale. Anche la Corte ha percorso dunque il sentiero della difesa oltre ogni ragionevole ragione dell’autogoverno della magistratura, escludendo dunque anche per il futuro ogni possibile diniego di approvazione della scelta del candidato effettuata dal Consiglio superiore.
E’ ben noto in questa magistratura che, a fronte di una logica spartitoria, l’unica risorsa per quanti ne ricevano un pregiudizio è costituita dalla promozione di ricorsi davanti al Tribunale amministrativo del Lazio e al Consiglio di Stato, che di frequente annullano i provvedimenti adottati in sede di autogoverno, divenendo in tal modo i gestori finali di quelle nomine.
Sino a oggi all’opposto non sono fortunatamente apparse nel Consiglio di Presidenza della giustizia amministrativa correnti vicine all’uno o all’altro partito politico, ma due gruppi si contrastano duramente in questi ultimi anni per l’adozione della migliore strategia da seguire nei rapporti con il Governo e il Parlamento, uniti restando soltanto nella benevola gestione della magistratura.
Prima di passare in rassegna le cause del malfunzionamento della giustizia amministrativa occorre, tuttavia, ricordare che si contano sul territorio nazionale soltanto circa 460 magistrati, distribuiti tra il primo e il secondo grado, per il quale opera a Roma soltanto il Consiglio di Stato. La responsabilità per tali sconfortanti numeri e queste deficienze strutturali ricade dunque esclusivamente sul Governo e sul Parlamento, che non si sono fatti promotori di un congruo incremento dei magistrati amministrativi di fronte a un progressivo incremento dei ricorsi e di una diversa organizzazione della giurisdizione sul territorio nazionale.
Sotto quest’ultimo aspetto sarebbe stato sufficiente seguire l’esempio del Conseil d’Etat, che ancora negli anni ‘80 ha promosso l’istituzione di Corti amministrative d’appello interdipartimentali.
Pur a fronte di questi dati obiettivi non possono, tuttavia, essere dissimulate le autonome responsabilità del Consiglio di Presidenza, restando privo di risposta il perché quest’organo, che è responsabile del reclutamento, delle promozioni, del controllo disciplinare e della formazione dei magistrati, non abbia comunque adottato, pur nel fragile quadro organizzativo esistente, misure capaci di migliorare il servizio giudiziario e di aumentare la produttività del sistema sulla base della laboriosità, capacità, diligenza e preparazione dei singoli magistrati.
All’inesistente controllo di tali qualità si associano le direttive emesse dal Consiglio di Presidenza per il carico del lavoro, per il quale è stata lo scorso anno fissata, da una parte, la soglia massima di 20 udienze all’anno per ciascun magistrato, esonerando quindi la potestà dei presidenti di Tribunale e di Sezione di provvedere diversamente per contenere la durata dei processi; dall’altra, è stato deliberato che non possano essere assegnati a ciascun magistrato per ogni udienza più di sei ricorsi; e ciò del tutto indipendentemente dal “peso” specifico di ciascuno di essi.
Si tratta di misure che palesemente mortificano la capacità organizzativa dei responsabili degli uffici e aumentano l’arretrato dei Tribunali.
Il regime di autogoverno, che mostra tanta attenzione per la tutela dei magistrati e che trascura di perseguire la qualità, la tempestività e l’efficienza della giustizia, ha dunque alimentato negli anni una generalizzata autoreferenzialità della magistratura; è costantemente mancata, infatti, l’adozione di parametri obiettivi per l’individuazione del demerito dei singoli, quale obiettiva preclusione alla promozione alle qualifiche superiori nei Tribunali amministrativi regionali; non è stato ricercato il merito dei singoli aspiranti per l’affidamento dell’incarico di presidente di sezione di un Tribunale amministrativo; non è stata effettuata alcuna valutazione del merito per il transito dei consiglieri di Tribunale amministrativo regionale al Consiglio di Stato; è stata posta in essere un’eguale procedura per la nomina dei Presidenti di Sezione del Consiglio di Stato e dei Tribunali amministrativi regionali.
La generalizzata inesistenza di una valutazione della professionalità di coloro che aspirano alle funzioni superiori manifesta dunque l’assenza di una corretta gestione delle promozioni: non appare, infatti, accettabile che, sotto la protezione dell’autonomia e dell’indipendenza, il Consiglio abbia indotto in tutti i magistrati amministrativi la generalizzata sicurezza per l’automatico conseguimento non soltanto di una retribuzione che aumenta progressivamente nel corso degli anni, ma anche di qualifiche superiori, restando ben lontano dall’individuare coloro che siano più meritevoli di altri e di quanti non lo siano affatto.
Sintomo di tale univoco atteggiamento appare anche la dispensa rilasciata a chiunque richieda di essere esonerato dall’obbligo di risiedere nella regione in cui ha sede il Tribunale, che per legge potrebbe essere accordata soltanto in casi eccezionali e per motivate ragioni: tale puntuale riscontro, infatti, non è mai avvenuto negli anni con una pesante ricaduta sull’organizzazione del servizio giudiziario nel territorio.
In tale deficiente quadro si associa, poi, la pressoché totale assenza di procedimenti disciplinari, la cui iniziativa spetta al Presidente del Consiglio di Stato o al Presidente del Consiglio dei Ministri.
Con il nuovo Governo in carica i rapporti con le magistrature sembrano ora destinati a cambiare, essendosi il Presidente del Consiglio più volte espresso in termini non elogiativi anche per i magistrati amministrativi; egli ha, infatti, annunciato l’esigenza di una prossima, radicale riforma della giustizia, che è stata da poco preceduta dall’anticipazione del termine per il collocamento in pensione dei magistrati ordinari, amministrativi e contabili, che passa da 75 a 70 anni, alla quale si assocerà a breve la riduzione da 45 a 30 giorni del periodo delle ferie.
In attesa di un futuro oltremodo incerto pare dunque doversi concludere che l’autogoverno delle magistrature non abbia dato negli anni la prova di operare nell’interesse generale della collettività nazionale e che di ciò sia a piena conoscenza il Governo.
Resta dunque da auspicare che, nella riforma della giustizia di cui tanto si parla, la politica possa intervenire, difendendo da una parte l’autonomia e l’indipendenza della magistratura, ma dall’altra salvaguardando la responsabilità del Governo di fronte al Parlamento, quale sede della sovranità popolare, con l’introduzione di efficaci controlli esterni per assicurare un efficiente servizio giudiziario: in tal caso resterebbe fermo, come ha ricordato in un recente scritto sulla magistratura Luciano Violante, il motto di Francis Bacon che, nella sua qualità di Attorney General e poi di Lord Chancellor, affermava che, nel rapporto fra giudici e politica, “i giudici devono essere leoni, ma leoni sotto il trono”.
Grazie per l’attenzione di tutti.
Potsdam, 10.10 2014
Francesco Mariuzzo